L'entreprise doit-elle prendre en charge le burn-out ?
17/06/2017 18:44
A chaque conférence que nous donnons dans le cadre de notre projet "SenseCare", la même question revient invariablement : pourquoi l'employeur devrait-il financer la prise en charge du burn-out alors que c'est un problème personnel ?
En octobre dernier, une de nos conférences avait pour titre : "Burn-out, couper les ailes aux canards". Ils volent toujours semble-t-il mais il est indéniable qu'une progression se fait sentir auprès des responsables des ressources humaines à défaut de l'observer auprès du management dans son ensemble.
Bien sûr le burn-out est un syndrome (un ensemble de symptômes) qui touche des individus particuliers. Tout le monde n'est pas susceptible de développer un burn-out dans des circonstances équivalentes. La composante personnelle est indéniable.
Bien sûr un burn-out se déclare très souvent par l'accumulation de facteurs qui concernent aussi bien la vie personnelle que professionnelle.
Non, un burn-out n'atteint pas une personne démotivée ou désintéressée de son travail. C'est d'ailleurs un de ses principaux signes distinctifs si l'on compare à d'autres affections d'ordre psychologique non liées au travail.
Bien sûr, certains burn-out sont mal diagnostiqués et l'incapacité de travail n'est pas toujours justifiée.
Bien sûr, les pratiques de management ont un impact direct sur l'apparition du phénomène au sein de l'entreprise, tant sur le plan individuel que sur le plan collectif. Je vous en ferai la liste dans un autre article.
J'ai d'autant moins de peine à être affirmatif qu'en observateur actif du monde du travail depuis près de 30 ans, je me demande comment le débat peut encore avoir lieu pour certaines situations que nous rencontrons.
Maintenant, faut-il pour autant que l'employeur finance la prise en charge d'un de ses collaborateurs qui glissent sur la pente du burn-out ?
J'aurais aimé apporter une réponse philosophique à cette question en vous faisant une discours moral sur la responsabilité sociétale de l'entreprise mais je doute fort de l'efficacité de ce message à l'heure où la performance est une nouvelle forme de religion.
La raison principale de l'engagement de l'entreprise à lutter contre le phénomène me paraît finalement bien plus simple. Je vois mal comment une entreprise échapperait à la nécessité de résoudre un problème qu'elle génère elle-même et dont elle vit en grande partie les conséquences. Vous me pardonnerez la comparaison qui suit mais il est parfois bon d'être au ras des pâquerettes pour se faire comprendre. Viendrait-il à l'idée d'une entreprise de ne pas financer la maintenance de ses équipements informatiques, voire de les upgrader, s'ils s'avèrent en surcharge ? Les décisions dans ce domaine font rarement débats parce que les conséquences sont immédiates. Pourtant les coûts engendrés sont de l'ordre d'une centaine de fois plus élevés que la prise en charge des collaborateurs atteints par le burn-out.
J'entends déjà les voix de mes détracteurs s'élever. Ils me rétorqueront que, là au moins, on est sûr du résultat alors qu'en matière de burn-out aucune prise en charge ne garantit le retour de la personne.
Tout d'abord, vous aurez un peu de mal à m'affirmer en me regardant dans les yeux que vous êtes certain du retour sur investissement de vos efforts financiers en matière informatique. Mais admettons.
Prendre en charge le burn-out ne vise en effet pas un retour performant à tous les coups mais bien à rendre la personne concernée capable de ne pas reproduire les séquences qui l'ont mise en difficulté. C'est pourquoi une prise en charge précoce est le meilleur moyen pour l'entreprise de maintenir au travail ses collaborateurs les plus engagés dans de meilleures conditions. Bien trop d'employeurs nous demandent d'intervenir lorsque leurs collaborateurs sont en incapacité de longue durée. Nous pouvons bien évidemment travailler avec eux lorsque c'est le cas mais nous préférons, de loin, activer nos trajets les moins lourds. Notre vocation est le bien-être au travail bien plus que la réorientation professionnelle.
Il n'y a, en entreprise, aucun domaine qui ne puisse pas être traité avec bon sens. Il en va de même pour le burn-out.
Pascal DENHAERINCK